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Dynamiques et rythme de la reprise de l’économie réelle en Turquie

L’activité économique connait en Turquie un redressement soutenu depuis le mois de juin, portée par un rebond rapide de la production et de la consommation interne. Néanmoins, le rythme de la reprise n’est pas uniforme à l’ensemble des secteurs et les incertitudes demeurent concernant la dynamique de la consommation intérieure (60% du PIB) dans la durée et la reprise de la demande externe.

 

L’industrie manufacturière connaît un rebond d’activité vigoureux depuis juin mais demeure pénalisée par la faiblesse des débouchés commerciaux externes

 

La reprise de l’activité manufacturière se confirme sur les quatre derniers mois : l’indice PMI manufacturier se maintient au-dessus de 50 (il a atteint son zénith en juillet : 56,9), tandis que l’indice de production industrielle poursuit son rebond (respectivement +4,5% et +10,4% en glissement annuel (g.a) en juillet et août 2020). L’activité du secteur manufacturier est principalement alimentée par la reprise de la consommation interne qui s’appuie sur une croissance exponentielle du crédit (24% en g.a en août en termes réels). Ainsi, le taux d’utilisation des capacités de production connait une hausse continue depuis mai, bien que restant inférieur à la même période de l’année passée (pour atteindre 73,3% en août). Les industriels turcs font néanmoins face à deux enjeux majeurs : la défaillance de certains de leurs fournisseurs locaux, tendance qui pourrait s’accélérer avec la réduction progressive du paquet de soutien à l’économie, et la hausse significative du coût des intrants liée à la très forte dépréciation de la lire turque :

 

  • L’industrie automobile enregistre une reprise soutenue de son activité (+44,3% en août en g.a, après cinq mois consécutifs de contraction) grâce à la hausse significative des ventes sur le marché local en juin (+66% en g.a), juillet (+385% en g.a) et août (+137% en g.a), portées par la demande différée et les facilités de crédit mises en oeuvre par l’Etat. Ainsi, les bonnes performances du début d’année et le rebond des ventes cet été ont permis au marché local de progresser de 68% en g.a au cours des huit premiers mois de l’année. Cela étant, le secteur demeure affecté par la baisse des exportations automobiles en juin (-8% en g.a), juillet (-25% en g.a) et août (-12% en g.a), en raison de la demande atone en provenance du marché européen (qui représente habituellement 77% des ventes automobiles turques). Les équipementiers, quant à eux, ont connu une baisse de 20% en g.a de leurs exportations sur les huit premiers mois de l’année et, sur les prochains mois, anticipent une baisse de la production par rapport à la même période de l’an passé.
  • La reprise du secteur du textile tarde à s’intensifier, le taux d’utilisation des capacités de production du secteur textile et du prêt-à-porter en août est à nouveau en recul par rapport à l’année précédente : respectivement 71,6% (contre 79% en août 2019) et 68,9% (contre 85% en août 2019). Cela étant, les exportations de l’industrie textile (prêt-à-porter, matières premières, cuir et tapis, etc.) ont augmenté de 6% en g.a en août, devenant sur le mois le premier poste d’exportation du pays grâce à la réorientation des commandes européennes et américaines, en particulier de vêtements de protection (masques, tabliers, etc.), de la Chine vers la Turquie.
  • La production d'acier brut en Turquie a augmenté de 7,5% en g.a en juillet et, au cours des sept premiers mois de l’année, n’a diminué que de 2,4% en g.a. Ainsi, la crise sanitaire n’a pas significativement affecté la production turque d’acier brut amenant les professionnels de l’industrie sidérurgique à anticiper, pour 2020, un niveau de production similaire à l’an passé (35 M tonnes). De leurs côtés, les exportations d’acier, après avoir diminué de 11% en g.a en volume au 1er semestre 2020, ont poursuivi leur contraction en juillet (-1,6% en g.a). Les performances du secteur resteront également soumises à l’évolution du régime des mesures de sauvegarde instaurées par l’UE.
  • Le secteur de la chimie de spécialité demeure dynamique et les professionnels du secteur anticipent un niveau d’activité similaire à 2019, bien que les exportations aient diminué de 15% sur les huit premiers mois de l’année. Après une activité particulièrement soutenue en mai au plus fort de la crise sanitaire (le taux d’utilisation des capacités de production atteignait alors 72,5%, soit un niveau supérieur à l’an passé), l’industrie pharmaceutique est aujourd’hui moins sollicitée : le taux d’utilisation des capacités de production est retombé à 66,7% en août dernier, contre 71% en août 2019.
  • L’activité de l’industrie aéronautique demeure pénalisée par la contraction significative des commandes civiles à l’export. Toutefois, le secteur de la défense fait exception, porté par la hausse du budget national dédié et ses performances à l’export (Chili, Philippines, Tunisie, etc.).
  • Le secteur de l’énergie souffre toujours de surcapacités et de problèmes financiers structurels. Néanmoins, la Turquie a enregistré un premier record de consommation d’électricité cet été puis un second début septembre (record historique de production journalière à 1,07 TWh). Avec la reprise de la demande, le mix énergétique a retrouvé un niveau plus normatif, d’où une relative hausse des prix.

 

Le redressement des principaux secteurs de l’économie turque, dynamique dans son ensemble, connaît certaines disparités

 

La fréquentation des centres commerciaux a augmenté de 37,2% en juillet en g.m mais a diminué de 40% en g.a, affectant le secteur de la distribution. Le volume des ventes dans les centres commerciaux ne représente que 70% du niveau d’avant crise et est notamment marqué par la baisse du nombre de visiteurs étrangers (qui représentent habituellement entre 10% et 15% du revenu des centres commerciaux). Les bonnes performances que le commerce en ligne connaît compensent en partie la baisse des ventes en magasin.

 

Les mesures prises par les autorités (crédits à taux réduits pour l’achat de logements, maturités élevées, période de grâce, etc.) destinées à raviver le secteur de la construction continuent à produire leurs effets contra-cycliques : l’engouement pour l’immobilier s’intensifie depuis le mois de juillet 2020 mais, à ce stade, n’a permis qu’une commercialisation des stocks existants. L’effet de ces mesures sur la construction se fera davantage ressentir en 2021. De plus, en 2021, les projets de modernisation de voies ferrées devraient stimuler le secteur de la construction. A l’export, les entreprises turques redoublent d’activisme dans certaines zones géographiques (Russie, Afrique sub-saharienne) malgré une diminution des volumes d’affaires.

 

Les entreprises du secteur de la logistique et des transports voient leur chiffre d’affaires augmenter mais les niveaux d’avant la crise sanitaire n’ont pas été retrouvés (baisse globale du fret de 35%). Si le marché local se porte dorénavant bien, la croissance du transport de marchandises se heurte à une reprise lente des secteurs les plus dépendants des exportations. Néanmoins, la résilience du secteur ainsi que les consolidations en cours et à venir (notamment dans la logistique industrielle qui continue à attirer des capitaux étrangers) devraient aider les entreprises à renforcer leurs positions commerciales sur les chaînes de valeur régionales et internationales. De surcroît, les transporteurs maritimes se sont engagés dans une démarche active de reconfiguration de leurs modèles d’affaires, se concentrant sur des produits à valeur ajoutée, et repensent leurs lignes régionales en Méditerranée.

 

L’ouverture des frontières, la reprise des vols internationaux et le retour des touristes anglais et russes (qui représentaient 21% des visiteurs étrangers en 2019) n’ont pas permis une reprise vigoureuse du tourisme, dont l’activité demeure significativement réduite. Si les arrivées de touristes étrangers ont connu un rebond depuis juin, elles demeurent significativement inférieures aux niveaux de l’an passé : -98% en g.a sur le 2ème trimestre de l’année, -71% en g.a en août (1,8 M d’arrivées) et -59,4% en g.a en septembre. Ainsi, l’activité du secteur aérien est attendue en baisse de 70% en 2020 par rapport à 2019 (contre 35 à 40% pour le marché domestique). Par ailleurs, le taux d’occupation des hôtels s’est élevé à 33% sur les sept premiers mois de l’année. Le secteur hôtelier fait l’objet d’une restructuration profonde, les groupes internationaux profitant de cette période de fragilisation pour renforcer leurs positions en acquérant de nouveaux hôtels.

 

Le secteur agricole a tiré profit de la crise sanitaire, enregistrant une hausse de sa valeur ajoutée de 4% en g.a au 2ème trimestre de l’année (alors que la croissance du PIB s’est contractée de 9,9% en g.a). L’activité du secteur demeure dynamique, portée par la demande intérieure et étrangère, en témoigne la hausse des exportations turques de produits agricoles et agroalimentaire sur les sept premiers mois de l’année (+10% en g.a). Cela étant, le secteur est confronté à la hausse du prix de l’alimentation animale et de certains intrants causée par la dépréciation de la lire turque, dont l’impact sera important lors des semis d’automne et d’hiver.

 

Dans le même ordre d’idée, le secteur des technologies et de l’innovation a profité de la crise sanitaire, les investissements en capital-risque et business angel ayant augmenté de près de moitié au cours du 2ème trimestre de l’année et les investissements de près de 280% en g.a sur l’ensemble du 1er semestre. En outre, le secteur a profité de la hausse des ventes de produits technologiques grand public, des logiciels et des technologies de l’information et de la communication.

 

Source : Service Economique de l’Ambassade de France

 

 

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